Téléchargements : Un modèle économique à revoir

Déjà, il y a quelques temps, j’ai poussé un coup de gueule et commis cette petite lettre ouverte à ce sujet. J’ai aujourd’hui envie de revenir un peu plus en détail sur ce sujet, toujours en utilisant l’exemple du merveilleux documentaire “L’Odyssée de la vie” de Nils Tavernier.

Le documentaire en question est disponible sur le site Vodeo.tv aux prix suivants :

  • 3 € pour le visionnement
  • 6 € pour le télé-chargement

Le DVD, quant à lui, est disponible au prix d’environ 20 €.

Considérant que le contenu demeure le même dans les trois formats, il serait sage de se demander qu’est-ce qui peut faire passer le prix d’un documentaire de 3€ à près de 20€. On peut bien prendre en compte certains frais manufacturiers en ce qui concerne le DVD (boîtier, pochette, édition, sérigraphie, etc) mais il est difficile d’admettre que l’ensemble de ces prestations représente 17€ de frais supplémentaires.

Il faut donc plutôt croire que ce différentiel vient financer l’infrastructure commerciale nécessaire pour mettre en marché ces DVD : marketing, administration, production, etc. Tout de même, une partie, si ce n’est la totalité de ces frais est financé par la vente du dit documentaire aux chaînes de télévision. Il me semblerait douteux de penser que MK2, ou tout autre maison de production vendrait à France télévision à perte. S’il font un profit lors de la vente de “L’Odyssée de la vie” à France Télévision, c’est que les frais entourant la production du documentaire sont pris en compte et donc couverts par cette vente.

Donc après la présentation du documentaire à la télévision, on peut croire que l’ensemble des produits dérivés (télé-chargement, DVD, cassette, etc) ne sont que pur profit pour les maisons de production. Tout ça demeure acceptable s’il est possible, lorsque l’on télé-charge légalement une oeuvre, d’en disposer à notre guise. Or dans l’exemple qui nous intéresse et qui est représentative de ce qui ce fait normalement, des mécanismes de protections nous empêchent de pouvoir graver l’oeuvre dûment achetée sur un DVD. Et c’est là que devient outrancier le discours de “protection des droits d’auteurs”, de sauvegarde de la propriété intellectuelle et tout autre charabia de ce type.

Lorsque le consommateur télé-charge légalement une oeuvre, le moins que l’on puisse faire, c’est de lui permettre d’en jouir à sa guise, de le fixer sur le média de son choix. L’achat d’une oeuvre doit être déliée du contexte du contenant où elle sera abritée. Les mécanismes de “Digital Rights Management (DRM)” viennent souder définitivement le lien Oeuvre <-> contenant en rendant ces deux éléments indissociables. L’industrie réussit ainsi, sous la fausse affirmation de protéger les droits des artistes, à retirer au propriétaire d’une oeuvre qu’il s’est légitimement procuré, le droit de choisir le contenant à partir duquel il désire apprécier l’oeuvre.

Imaginez la tête de l’acheteur d’une oeuvre de grand renom (disons “Impressions, Soleil Levant” de Monet) qui se ferait dire “D’accord on vous vend l’oeuvre, mais vous ne pourrez la voir qu’ici au musée d’Orsay car c’est là qu’elle sera la plus en sécurité”. Ou encore “OK, on vous la vend, mais il vous faut acheter le mur avec et ne jamais décrocher le tableau”. Absurde, non ? Et bien c’est en substance ce que nous prépare l’industrie et l’Etat avec la loi DADVSI.

Il y a 20 ans, nul n’aurait imaginé perdre la possibilité de pouvoir enregistrer son vinyle préféré sur une cassette audio pour pouvoir l’écouter dans sa voiture. C’est pourtant ce qu’aujourd’hui, les DRM et autres mécanismes de protection visent à établir : l’interdiction de choisir le contenant de l’oeuvre dont le consommateur est légitimement propriétaire.

J’aurais bien voulu télé-charger légalement “L’Odyssée de la vie” pour la graver et la regarder en famille le soir. Malheureusement, l’industrie ne le voit pas de cette façon. Plusieurs se retournent alors vers le télé-chargement illégal et ne reviennent plus vers la légalité.

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