“De loin on voit mieux, parfois”

J’aurais aimé pouvoir répondre dans le fil de cette discussion, mais FB ne me le permet pas. Donc je reproduis ici (sans autorisation bien sûr) :

“Roméo Bouchard”

ATTENTAT TERRORISTE DE DROITE À QUÉBEC

On se doutait que ça finirait par arriver chez nous,
Mais on ne se doutait pas, selon ce qu’on en sait, que nous serions les premiers à porter l’odieux d’un attentat terroriste de droite de cette nature, un attentat islamophobe plutôt qu’islamique.

(Ceci dit sous toute réserve d’informations plus précises à venir sur les motivations des auteurs)

Et comme par hasard,
ça se produit à Québec, où plusieurs médias et plusieurs groupuscules alimentent la haine et l’islamophobie,
ça se produit le lendemain que Trump ait signé des décrets d’exclusion des visiteurs et immigrants de pays islamiques, après des mois à semer la haine contre les étrangers, au grand plaisir de tous les groupes de droite.

Tout cela, malheureusement, risque fort d’envenimer pour longtemps les relations déjà troubles entre les Québécois de confession musulmane et les Québécois souverainistes jugés trop identitaires..
Il y a fort à craindre que ceux qui se plaisaient à accuser facilement les Québécois d’islamophobie et d’amalgames au détriment des musulmans ne se permettent à leur tour de faire des amalgames trop faciles entre les auteurs de cet attentat islamophobe et le peuple québécois en général?

Un climat de plus en plus malsain.

 A ce texte, mon père répond (pôpa, pense à mettre des retours à la ligne de temps en temps):
Benoît Bouchard
Il est évident que tous les amalgames sont possibles.La tentation est forte d’associer le nationalisme québécois aux extrémismes de droite même si cela n’a rien à voir. Le problème est que nous avons eu la naïveté de croire que l’influence du terrorisme,je dis bien l’influence et non le terrorisme lui-même ,nous avons cru que cette influence ne toucherait pas un pauvre bougre endoctriné par des médias écrits et parlés qui alimentent ses obsessions jusqu’à ce qu’il décide de passer à l’acte. Il y a des irresponsables, à Québec en particulier, qui inondent les ondes avec leurs bavures malsaines et leurs commentaires irresponsables. Il y a ceux qui,jour après jour, alimentent les forums publics de leurs commentaires haineux contre tout ce qui est pouvoir,autorité, fustigeant tous ceux qui ont le malheur de s’impliquer en citoyens responsables.Tous ces messages de haine dans un pauvre esprit malade donnent les résultats que nous choquent aujourd’hui.Il serait peut être temps que nous assumions collectivement le piètre état moral dans lequel notre société se retrouve. Je sais qu’il ne faut pas prononcer ce mot:moralité.C’est dépassé et juste bon pour des vieux comme moi.C’est pourtant grâce à des valeurs solides qui célébraient l’entraide,le respect des autres,la confiance dans l’avenir que les québécois d’hier ont bâti ce pays. Ils n’avaient guère le temps de rendre les autres responsables.Ils n’avaient que celui d’espérer des meilleurs lendemains. Je suis sûr qu’il y aura de meilleurs jours. Je ne sais pas,cependant quel prix il faudra payer pour enfin comprendre que la tolérance,la fraternité,le partage sont les meilleurs remèdes contre l’intolérance.
 Bizarrement la veille, dimanche, j’avais enfin eu le temps de regarder un film de Denis Villeneuve que je voulais voir depuis longtemps, “Polytechnique”. Et puis je me suis payé l’incontournable session de recherche sur Internet pour savoir ce que j’avais laissé derrière.
Le six décembre 1989, j’étais dans la cafétéria de la faculté de Génie de l’Université de Sherbrooke quand j’ai appris que Marc Lépine venait de tuer quatorze étudiantes, de celles  qui auraient pu être mes futures collègues, à l’école Polytechnique de Montréal. J’ai été personnellement touché par cet acte terroriste. Mais à l’époque ça ne voulait pas dire grand-chose. Les Américains n’étaient pas encore passés par là.
Dimanche, ce timbré c’en est pris à des musulmans. En 1989 c’était des femmes. En 1984, Lortie en avait contre les indépendantistes. Bien sûr, l’attentat de Québec résonne dans l’actualité québécoise et internationale. Évidemment, d’ici en France, je n’ai aucune idée du contexte dans lequel cet acte infâme s’est produit. Du contexte de la presse, de l’animosité. Peu m’en importe. Il y a peu de différences entre Lépine et cette autre tache que ne n’ai pas envie de nommer (faudrait que je cherche sur google pour m’en souvenir et il n’en vaut vraiment pas l’effort).
 Avec le recul, parfois, on voit les choses différemment. J’ai vécu les attentats de Paris en spectateur (ben oui, les deux, Charlie / Hyper Casher : 17 morts et le Bataclan : 130 morts). Scotché aux écrans, téléphone, radio. Occupé à rassurer ma fille par SMS qui pensait que les frères Kouachi étaient à quelques kilomètres de la maison. A regarder l’assaut de l’Hyper-Kasher en direct. Puis quelques mois plus tard, rebelote : je me réveille un samedi matin et ma femme qui me dit “Il y a eu un autre attentat : y’a 120 morts”. Honnêtement, je ne l’ai pas crue.
Bien évidemment, il n’y a pas de hiérarchie dans l’horreur. Par contre, il y a un contexte. Tuer aveuglément reste inacceptable. Lépine a tué quatorze femmes parce qu’il en voulait aux féministes. Lortie, mentalement touché, en voulait aux indépendantistes. L’autre en voulait aux musulmans. Pas au Québec. Pas à la façon de vivre des Québécois. Pas au pays.
Les Kouachi, Coulibali, Merah et autres en voulaient à la France, à l’occident, à notre façon de vivre, d’être, d’exister. Même chose à Nice, Berlin, Londres, Barcelone, Istanbul. Le reste de la liste m’échappe.
Ne vous trompez pas de contexte seulement à cause de l’air du temps. Sinon vous faites le même raccourci de ceux que vous dénoncez.

Leave a Reply