Atelier d’écriture Bric A Book : En genre et en nombre

Homme au milieu de femmes.  Image masculine au milieu d’un monde féminin. Vision du monde vu des yeux d’un homme.  Celui, pourtant, qui montre le premier regard de l’homme sur la femme, qui leur enseigne ce qu’est le regard de lui sur elle, sur elles.

J’ai déshabillé des femmes pour prendre leur image. Je ne leur ai même pas laissé de voile pour abriter les détails de leur corps.  J’ai montré à d’autres ce qu’elles abritent normalement sous tricots et tissus. Leur ai demandé de bouger légèrement pour mieux voir leur poitrine.  De monter sur la pointe des pieds pour raidir les muscles des fesses. Tout ça pour l’image.

Et puis je leur ai demandé, plus tard, pourquoi elles acceptaient de se dénuder pour moi, pour l’objectif.  J’ai toujours eu des réponses positives de leur part :

– J’aime bien

– C’est super agréable d’avoir de belles images de soi

– Je ne vois pas ce qu’il y a d’indécent dans la nudité

Puis j’ai vu des femmes photographier des femmes, Bettina Rheims, Dominique Issermann, Annie Leibovitz. Et j’ai compris que le sexisme n’était pas dans l’image, il était dans le regard. Dans les habitudes et les ancrages culturels.

Dans ce que l’on passe à ses enfants, les mots, les conventions, les habitudes. Sur les unes des magazines qui vous demande de maigrir en mai, en janvier, ou quand les tirages le demande.  Quand une journaliste se demande “qui servira le café”, un soir d’élection où la parité homme-femme chez les candidats est obligatoire.  Dans les jeux, les activités que l’on suggère à nos enfants.

Dans “l’heure des maman” où j’y côtoie de plus en plus de mes pairs de genre.  Dans les soirées entre potes, d’un coté, et entre filles de l’autre.  Dans les films de gonzesses. Dans tout ce mélange de comportements que l’on se sent obliger de classer en fonction du genre. Dans la surprise de voir un garçon surdoué entrer à l’Opéra de Paris.  Dans le surplus de pathos suite au décès d’un policier dans la rue à Montrouge, parce que c’était une femme.

Bien sûr tout le reste demeure, demande à être dénoncé, évité, modifié.  Pourtant, ce qui est décrié ici passe pour normal ailleurs et vice-versa.

Je sais, je sais. Sexisme est un mot masculin.

2 Comments

  1. J’aime la façon dont la réflexion est amenée.

  2. Leiloona dit :

    “Et j’ai compris que le sexisme n’était pas dans l’image, il était dans le regard” : tout est dit.

    Très belle réflexion, et bien écrite.

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