Réflexions d’un télé-travailleur

Quelques personnes le savent : je suis un télé-travailleur convaincu depuis plusieurs années. Mon travail d’ingénieur de support au niveau européen sied tout à fait à ce type d’activité. J’interviens auprès de mes interlocuteurs par e-mail, messagerie instantanée et par téléphone.

Le télé-travail est pour moi un net avantage. Il me permet de pouvoir accommoder ma vie familiale avec mes impératifs professionnels. Je peux tout à fait passer récupérer les enfants à l’école et revenir continuer le travail sans trop d’interruptions.  Au même titre, je peux participer à un appel conférence avec Singapour à 8h30 du matin sans avoir à me presser.  Je profite donc de cette situation et mon employeur y trouve aussi son compte.

Le problème dans tout ça, c’est qu’en l’absence de politique de télé-travail formellement définie par mon employeur, la possibilité de télé-travail reste très aléatoire. Trop souvent, l’accès au télé-travail reste “à la tête du client”, c’est-à-dire au bon vouloir du manager. Et lorsque l’on engage une négotiation, le premier argument est “vous aller économiser en travaillant de chez vous, améliorer votre qualité de vie, vous ne voulez tout de même pas qu’on paye pour ça ?”

Malheureusement, c’est oublier l’augmentation de productivité constatée dans tous les cas où le télé-travail entre en jeu. Je sauve plus de 90 minutes par jour en évitant la circulation francilienne.  Je garde des horaires de travail sensiblement identique. Je suis cependant disponible une heure plus tôt.  La réaction des organisations syndicales a ce type d’argument est d’amener une liste d’épicerie de revendications et de demandes qui font souvent capoter les négociations.

Il est particulier de voir comment deux parties opposées ne peuvent s’entendre lorsque ces deux mêmes parties bénéficieraient d’un cadre bien défini pour ce type d’organisation du travail.  A ce titre, la société française est retard.  Pour le manager, il désire maladivement garder un œil sur ses subalternes.  Pour l’employé et par extension pour ses représentant syndicaux, il faut récupérer le plus d’avantage de ce mauvais patron.  Bien sur, on ne peut être dupe de ce type d’arguments. Sauf qu’en attendant, plusieurs continuent d’être obligé de prendre la voiture, faire des dizaines de kilomètres chaque jours alors qu’ils pourraient peut-être l’éviter.

Il ne faut pas être dupe non plus des directions qui utilisent ces arguments pour diminuer leurs coûts, limiter le nombre de m² à louer, fermer des agences de province sans vraiment d’alternatives pour les employés de ces agences que le télé-travail forcé.

Car le télé-travail n’est pas non plus une panacée.  Il faut être attentif aux effets secondaires de la juxtaposition du cercle privé et du cercle professionnel qui n’est jamais tout à fait imperméable.  Les enfants qui arrivent dans le bureau pendant un appel conférence avec le patron, une réunion à 22h parce que en zone horaire des U.S. Il y a aussi d’autres effets un peu plus sournois.

Dans mon cas, je découvre que je me suis confiné à une vie qui se passe presque uniquement à la maison.  Je peux passer plusieurs jours sans voir un autre endroit que mon appartement et les alentours.  Ce confinement devient peu à peu difficile a gérer et entraîne même des comportements un peu difficiles.  Il est donc important de ne pas perdre de vue que le télé-travail n’est pas une fin en soi. La vie continue à l’extérieur et il est impératif de garder des activités en dehors de cette sphère domestique.

Leave a Reply